Marino possédait un don particulier pour la création artistique.
Devant une feuille blanche ou un bloc de marbre, naissait dans son esprit un feu d’artifice d’idées créatrices en une fraction de seconde.
J’ai toujours entendu dire que Di Teana était un « bourreau de travail », mais le terme était mal choisi, il adorait son métier et, toujours en action, il ne s’arrêtait jamais. Son imagination était sans limites et sa production colossale. Un rien suffisait à l’inspirer.
Un soir où nous étions en Italie, dans une maison de Toscane perdue au milieu de la nature, je regardais en silence le spectacle reposant et fascinant du fin panache dansant de la fumée d’une bougie jusqu’à son extinction. Je n’avais pas vu qu’il regardait exactement la même chose.
Ce fut un très beau moment qu’il parvint à capter et traduisit en peinture dès le lendemain.
Marino était aussi un travailleur manuel acharné, mais le corps humain a plus de limites que l’esprit. À partir des années 1995, il commençait à être fatigué et ne pouvait plus découper, souder ou poncer dans la forge comme avant. Il déléguait progressivement les tâches, laissant à d’autres le soin d’accomplir les étapes les plus physiques de son travail, mais toujours avec cette même exigence du détail et de la finition. Tel un véritable artiste, il ne voulait pas s’occuper de l’administratif ou de la communication et préférait peindre à l’atelier. C’est alors que j’ai commencé à l’assister activement dans tous les domaines, organisant les expositions, assistant la réalisation des pièces d’éditions, regroupant ses milliers d’archives éparpillées aux quatre coins de l’atelier.
Il y avait tellement d’admirateurs que je voyais déjà l’avenir se profiler. Gérer le fruit de 60 ans d’un travail quoti- dien, composé de centaines de pièces les plus diverses, maquettes, plâtres, bronzes, sculptures, tableaux, dessins, textes, plans, projets, structures monumentales... tout ce qui se trouvait dans l’atelier mais aussi tout ce qui avait été vendu, donné, prêté et parfois disparu.
Le souhait de Marino était de « laisser une trace », et de « transmettre ses idées pour la jeunesse, afin de s’en inspirer et qu’ils puissent aller encore plus loin ». Un projet de fondation-musée était né en Allemagne, mais pourquoi refaire ce qui existait déjà ? Son atelier époustouflant, chargé de vie et d’histoires et qu’il avait mis des années à construire de ses mains était en soi un musée à conserver.
Par Malika Vinot Catalogue Raisonné Extrait